vendredi 13 août 2010

C2. LES TEMPLES JAINS de GIRNAR GIRI (JUNAGADH)



LES TEMPLES JAINS
de
GIRNAR GIRI

(Junagadh)




A l'aube, vous quittez votre lit douillet à Junagadh.
Vous marchez deux kilomètres jusqu'à un arrêt de bus.
A défaut de bus, vous embarquez dans un tempo.

En cahotant, il remonte une vallée boisée de collines.
Je remarque un jabiru à l'un de nos arrêts.
Un couple donne des feuilles bien vertes à deux buffles d'eau.
Nous franchissons une rivière, la route dessert plusieurs temples hindous.

Junagadh est une capitale de district du Kathiawar, une des trois régions composant le Gujarat.
Si vous perdez le fil, prenez un atlas.
Vous voyez l'Inde ?
Regardez en haut à gauche (au nord ouest, comme disent les géographes).


Girnar Taleti est au terminus de la route.
C'est surtout le départ pour l'excursion aux temples jaïns de Girnar Giri.
Vers 7h30, thé dans une dhaba en regardant l'arrivée de quelques personnes.

Commençons à monter les premières marches.
Inutiles de se presser, il y en a plus de 5000... si l'on souhaite aller jusqu'au sommet.
Ce qui est fermement mon intention.

- - -

Certaines échoppes sont déjà ouvertes.
Des longos descendent des arbres par grappes. Leur longue queue arrondie, ils approchent du sentier de pierres, attirés par la nourriture.
Des petits gambadent, se poursuivent.

Un ou deux gros mâles se plantent au milieu du sentier.
Des pèlerins et certains vendeurs les nourrissent bien.
Sans les regarder, je passe tranquillement à côté d'eux.
A part quelques biscuits et cacahouètes, maigres provisions pour cette journée, je n'ai rien à donner à ces mendiants.

Les marches sont parfois numérotées.
Les longos se concentrent à proximité de Girnar Taleti.
Entre les marches 300 et 400, leur nombre diminue rapidement.
Au-dessus, on n'en voit plus.

Pendant une heure, je sue littéralement.
Pourtant, il ne fait pas encore très chaud.
Le sentier traverse un bois, est souvent ombragé.
Mais je suis un peu rouillé...
Je m'arrête toutes les 20 minutes environ, ou quand je photographie quelque chose.

Peu de tentes sont occupées par les vendeurs de boissons ou de nourriture, car il est un peu tôt.
Des oratoires hindous sont éparpillés au bord du sentier.
Je ne m'arrête pas pour discuter, je préfère avancer.

Au bout d'une heure, j'atteins plusieurs pavillons, d'où l'on domine un beau panorama sur Girnar Taleti.
Je découvre un lac, le Damovar Kund.
Au fond d'une autre vallée, à l'horizon, l'urbanisation de Junagadh est également visible.

Après 9h, je deviens chèvre, mes jambes montent toutes seules.
Peu à peu, le sentier quitte les bois, longe la base de gros rochers.
Les escaliers deviennent plus raides.
Je suis très en forme, mais je m'arrête souvent pour admirer les rampes du sentier escarpé.

Le sentier monte à l'assaut des gros rochers, qui me rappellent d'autres randonnées, au Larzac, par exemple.
Une première cascade tombe, le coupe, l'eau ruisselle sur les marches.
Je croise sept jeunes, garçons et filles. Cela m'étonne... Ou alors ils n'ont vu que le premier temple et ont ensuite rapidement rebroussé chemin.

Les cabanes où l'on vend biscuits, cacahouètes, amuse-gueules, et boissons, sont presque toutes occupées.
Oratoires et temples souvent dédiés à Shiva sont nichés dans des grottes.
Je découvre plus haut de vastes grottes dont la roche est trouée, comme par l'impact d'obus.
Je photographie les marches 1000, 2000 et 3000.
Quel culte du nombre rond !

La fin de la montée me semble facile.
Des nappes de brume apporte de la fraîcheur.
Le ruissellement d'autres cascades également.
Plusieurs petits temples hindous précédent l'arrivée, par une arche, sur le site des temples jaïns.

A quelques mètres, j'entre dans le Neminath Temple.
Neminath est le vingt-deuxieme tirthankar jaïn.
Construit au XIIe s, son temple est le plus ancien et le plus grand du mont Girnar.

Sandales ôtées, on veut absolument garder mon petit sac à dos dans le bureau d'accueil. Je ne prends que cahier et stylos.
Et bien sûr, un petit Ixus, presque invisible, à moins d'une fouille sérieuse (comme au temple de Somnath).

Je raconte cette visite dans "L'ange gardien de Girnar Giri", dans ce blog.
Le héros, un gardien en uniforme, me marque à la culotte pour m'empêcher de photographier ce qui m'intéresse...

Je continue ma visite du site après 15h30.
Les autres temples sont fermés, j'ai eu raison de m'attarder au premier.
Tout près, un temple possède de magnifiques moucharabiehs de pierre, merveilleusement ciselés.
Les motifs me rappellent les mosquées d'Ahmedabad.

Des toits-coupoles, ruisselant de céramiques, me rappellent le Gufa de Balkrishna Doshi (idée à appronfondir).

Plusieurs temples hindous cohabitent avec les temples jaïns.
Je monte progressivement depuis la marche 3850 (Neminath Temple), jusqu'au dessus de la marche 4500.

On découvre un panorama exceptionnel sur les toits de dizaines de temples.
Toits classiques de pierre gris ou marron, coupoles ornées de céramiques multicolores, quel régal !

Le temps se dégrade.
Des nappes de brume gagnent les hauteurs et le vent se renforce.

Cela présage une fin d'après midi pluvieuse...

Plus haut, les marches mènent à une nouvelle arche de pierre presque entièrement recouverte de mousse. Il a beaucoup plu depuis le début de la mousson...
On franchit la marche 4800 avant le passage d'une autre arche.

Je m'assieds devant l'Ambika Temple pour manger un peu (pomme, biscuits, cacahouètes).
Le brouillard cache maintenant les deux vallées. Impossible de distinguer le complexe du Néminath Temple...
C'est l'Ecosse, aux landes hantées de fantômes, comme celui de Lady Macbeth,...

Derrière le temple, on peut se restaurer dans une dhaba.
Je préfère continuer jusqu'au sommet.
Le sentier descend jusqu'à un pont.

Alors que je le franchis, la pluie commence... Je sors ma veste de montagne, car l'averse devient furieuse.

Plusieurs oratoires hindous coiffent le sommet des rochers, dont l'un occupe un semblant de grotte.
Je risque d'abimer le Canon, aspergé de pluie, ou la carte mémoire...

Je redescends m'abriter sous le toit d'une bergerie.
Nous sommes une demi-douzaine à attendre que l'orage se calme pour continuer notre route.
D'autres arrivent peu à peu...

Profitant d'une accalmie, je prends quelques photos des temples hindous.
Il n'est pas 17h, mais les bonnes heures sont passées.
Avant le retour, arrêt à la dhaba pour un thé.

Une vieille, assise à l'écart, attend la fin de la pluie. Je l'ai vue souvent depuis le Néminath Temple, pendant la montée.
Isolée, elle n'ose s'asseoir dans la dhaba, faute d'argent.

Quand je lui propose un thé, elle refuse, sans doute par incompréhension.
Alors je demande à un garçon de lui apporter un thé, qu'elle accepte.

Descente tranquille, pour éviter de glisser sur les marches mouillées.
Trois-quart d'heure plus tard, ma bonne humeur redouble.
La pluie s'arrête et le soleil illumine le ciel.
Au diable la veste ! Je ressors le Canon pour quelques photos.

A 18h, j'arrive au premier des pavillons panoramiques.
Je m'offre vingt minutes, torse nu, à sécher au soleil...
La nature embaume, les animaux expriment leur satisfaction après la pluie.
Moment de solitude et de joie parfaites.
Je n'ai guère envie de redescendre vers Junagadh, la ville, la circulation...

Fin de randonnée.
Le soleil s'estompe, la nuit va s'installer lentement.
A Girnar Taleti, je demande le chemin du lac, observé à l'aller comme au retour.
Le Damovar Kund ? A trois kilomètres !
Moi qui pensais qu'il était à côté...

Un guide obligeant me fait visiter un dharamsala jaïn.
Du moins, la partie religieuse, avec chapelles et statues de tirthankars.
Il allume les salles au fur et à mesure de notre passage.

Un rabatteur me harponne : "40 roupies pour Junagadh !"
Et il veut me pousser dans un tempo !
Je lui réponds que personne n'est assez fou pour l'écouter, puisqu'un tempo coûte 5 roupies !

De plus, je souhaite prendre mon temps.
Je commande un thé en terrasse, pour observer les gens.
Un groupe d'une trentaine de pèlerins met un temps fou pour s'entasser dans trois tempos... puis pour s'ébranler vers Junagadh...
Discussions, changement de tempo, contre-ordres...
Pas question de me mêler à ces agités.
J'attends en paix l'arrivée du tempo suivant...


Lionel Bonhouvrier.

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